Manches courtes

C’était le soir béni où l’air était tiède et sentait la montée de sève. Le soir attendu où la fenêtre était enfin ouverte et où je brûlais d’envie d’être en manches courtes. Le souffle de l’air venait caresser ma peau comme un amant délicat pas trop pressé de conclure.

L’air était tiède, assez pour enlever les couches d’oignon qui masquaient mes formes mais pas encore assez pour je n’exhibe plus que des sous vêtements un peu rallongés : short et marcel étincelant. L’ultime étape serait d’offrir mes cuisses au baiser du soleil, aux morsures du vent, aux caresses de l’eau et mes seins à celui qui partagerait ma couche.

Le soir attendu où la fenêtre était enfin ouverte et me permettait d’entrer et sortir sans devoir faire un long et fastidieux détour par les pièces en enfilade. Je n’aimais rien autant que d’enjamber la fenêtre, cela me donnait un gout profond de liberté, comme si je franchissais un tabou en franchissant ce seuil les jambes les premières. Soir béni et attendu où ma chambre enfin donnait toute entière sur le monde extérieur qui pouvait entrer et moi sortir, et le matou de la maison ne s’en privait guère.

J’ai un gout particulier pour les manches courtes et les cols ouverts. Manches courtes parce que cela offre enfin au regard le pli du poignet. C’est un endroit magique et magnifique. La peau y est particulièrement fine, transparente, douce. Elle concentre les fragrances et les frémissements. Le col ouvert quant à lui est une pure invitation à la polissonnerie. Il dévoile, sous couvert de parfum – celui du commerce ou celui ô combien plus merveilleux de la peau – un petit carré de peau qui bat. C’est l’endroit où le coeur fait tapage et s montre dans un gouterelle parfois minuscule mais qu’on devine. pulsation de vie, pulsation de désir. C’est l’endroit aussi, ô bonheur, où affleurent les powal de la poitrine, les bouclettes dans lesquelles j’ai tant envie d’aller tortiller mes doigts.

Le printemps venait de border l’hiver dans son lit, comme une amante qui couche son vieux père déjà toute à la joie de sa sortie. Le chêne de la placette d’en face en s’y trompait pas, il défroissait ses bourgeons dodus, il savait qu’il n’aurait plus à tendre l’écorce pour écouter les confidences, la chaleur ouvrait grand les volets et les mots se remettraient à danser dehors. Pour l’heure, je sentais dans mon dos monter la même sève, le même élan que celui qui agitait le vénérable. Nous sommes tous interdépendants…

Sablier givré n°7, d’après une amorce de Lyjazz

5 réflexions sur “Manches courtes

  1. Oui, c’est à ce genre de réponse que je pensais en donnant cette amorce !

    Qu’est-ce que j’en ai marre du froid !

    Vivement les manches courtes !

  2. Moukmouk) Bonjour, bonjour monsieur Printemps / A la grand route des nuages / Avez vous fait un beau voyage / Et qu’apportez vous si content ? Je vous apporte le beau temps / Mes enfants / A répondu monsieur Printemps…

    Lyjazz) Vivement les manches courtes et les montées de sève qui nous donnent des fleurs !

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