Une rencontre discrète

Mercredi dernier, tout pile une semaine, peu après le col de la Grosse Pierre, entre deux gouttes de crachin, me vient l’envie d’aller humer une écorce de hêtre d’un peu plus près. Scratch, entends-je, sous mes pieds. Un bruit furtif, unique et non renouvelé. Je baisse les yeux à la recherche de l’animal que j’ai dérangé sans le voir et qui a évité l’écrasement d’un mouvement salvateur de dernière minute. Il est forcément aux aguets, parfaitement immobile.

Je cherche, je cherche en balayant le sol et les feuilles de mon regard laser. Et tout à coup je tombe, presque oeil à oeil, avec cette charmante grenouille rousse. Les yeux dans les yeux, je sollicite toutes mes articulations pour me rapetisser en douceur au maximum, m’aplatir sur le sol mou à souhait pour faire un brin de jasette avec le belle. Frog c’était mon surnom plus jeune alors vous pensez, la tentation était bien forte. Et je n’ai guère l’occasion de placoter avec des grenouilles à Paris.

Elle était encore toute tremblante d’avoir évité par sublime réflexe que mes soixante kilos ne la réduise en bouillie visqueuse. Tremblante et bien timide au début de la conversation, je vous laisse juger par vous même ! Mais l’œil rond et vif pour ne rien rater de mes déplacements et des éventuels dangers avoisinants. Le temps passant, elle s’est avérée moins inquiète que la délicieuse souris que j’ai dérangée un peu plus loin en cueillant des brimbelles. Moins inquiète et beaucoup plus coquette. Mais c’est une autre histoire

Col de la Grosse Pierre, Vosges