En douceur

Départ ce soir d’un grand homme, après 34 ans d’une loyauté sans faille et pas toujours reconnu et valorisé à sa juste hauteur. Je lui ai dit en partant que je le considérais comme un grand homme, ce qu’il n’apprécie pas dans sa modestie, et que je l’aimais. Parce que c’est vrai, c’est un homme vrai, intense, loyal, délicieux, entreprenant. Feed-back et empowerment garde -t-il comme enseignement de ses années à Toronto. Et c’est tout à fait lui.

Il a conclu son discours d’au revoir par cet étonnant proverbe africain : l’arbre qui tombe fait plus de bruits que la forêt qui pousse.

Parfois je doute que le forêt pousse encore…

Devinette

Qui peut bien être le lauréat de la 4e édition du concours « Paysage insolite » du centre permanent de la photographie de Fournels dans la catégorie « professionnel » ?

Réponse le 27 juin 2010. Un bon prétexte pour aller se balader dans ce village minuscule de la Lozère, aux portes de l’Aubrac.

Allez, je vous donne un indice, je parie qu’il a déjà gagné un prix lundi dernier au concours « La photo et son propos », avec la même photo et le texte suivant… intitulé le cimetière des éléphants :

Je marchais depuis trop longtemps, j’étais à bout de forces. J’avais transpiré, souffert ; je n’y croyais plus. Après les cols difficiles, ce lit de rivière asséché m’avait d’abord semblé un apaisement, un  guide. Mais comme je le remontais depuis un bon moment maintenant, le doute m’étreignait à nouveau. Desséché, balayé par le vent, je me sentais devenir un fétu plus léger à chaque pas.

L’horizon finit tout de même par s’élargir un peu, mince ouverture pour que l’espoir se faufile. Il me sembla deviner au loin des buissons verts posés régulièrement sur le lit de cailloux : décor de train miniature ou facétie de géant se jouant de mes angoisses ?

Je n’entendais rien d’autre que le bruit de mes pas dérangeant les cailloux. Pas de crissement de métal, ni d’agitation animale, ni de présence humaine. Juste l’immensité minérale et désertique. Après bien des heures, je pus enfin distinguer les bosquets : mirages ? Improbables îlots de verdure dans un désert inhospitalier ? Curieux bosquets de métal !

Ce n’étaient que carcasses militaires exposées aux quatre vents, vestiges et tronçons de véhicules légers. Je n’en croyais pas mes yeux. Le maître des lieux n’était finalement pas si facétieux. Quelle idée de collectionner des Meccano dans un lieu pareil ! Pourquoi les découper ainsi ? Où étaient les roues ? Pourquoi ce lieu de désolation secret et inaccessible ? Par quelle main cauchemardesque était-ce possible ?

Il me sembla tout à  coup que les galets m’observaient, que mille paires d’yeux me scrutaient, que les lambeaux de métal se déplaçaient. Il me sembla que la souffrance des militaires qui avaient sombré là, avait pris le même chemin que moi et revenait ici hanter la mémoire.

© Pali Malom